Meutre ...

Le froid ravageur de l'hiver avait pris possession des terres, recouvrant la terre craquelée de son habituel manteau de neige. D'énormes bourasques glacées dévalaient les plaines a toute vitesse, secouant sans mal les arbres dénudés, qui retenaient avec acharnement les feuilles roussies qui pendaient au bout de leurs moignons noircis. Le vent s'y mettait également, et maitre Mistral le puissant galoppait parmi la froidure hivernale, décollant les habitants des forets, pouvant meme faire envoler un cerf adulte... Alors un loup !... Le ciel matinal était d'un bleu glacé, et se couvrait rapidement de gros nuages menacants, anoncant une autre terrible tempete. L'hiver arrivait donc a grands pas, aux déplairs de certains, a la joie de rares autres...

L'ombre fugitive qui se glissait entre les troncs massifs faisait partie de cette élite. A son passage, corbeaux et moineaux se taisaient soudainement, comme grillés en plein cours de chant. Chevreils et lapins dégerpissent sans un bruit, cherchant a fuir une menace de plus en plus importante... Pourtant, personne... Hormis l'ombre, arrachée des enfers par Satan, envoyée pour semer la terreur sur la terre... Boulot qu'elle acomplissait avec un ravissement malsain ... Une ombre a son tableau de chasse : les betes sentaient son aura malfesante, et taisaient leur présence... Mouarf, la démonne aurait mieux fait d'se teindre en rose ...

Des pattes souples se glisserent sans aucun bruit sur le gel éclatant qui tapissait le sol d'une moquette de cristaux tranchants et glissants. Deux yeux d'un rouge sanglant balayerent la plaine brumeuse, a la recherche de son crime horaire a accomplir. Deux braises ardentes, presque sans pupille se fixerent sur un lievre blanc endormi, avec la précision d'un microscope ensorcelé... La créature alors se remit en marche, son pelage noir et blanc, lissé ou enmélé selon les caprices du vent, se détachant plus ou moins nettement sur l'étendue desertique s'aprocha lentement du futur condamné... Qa gueule s'ouvrit lentement, dévoilant des crocs monstrueux et d'une blancheur a faire mal aux yeux, a l'aproche de son futur ' repas ' ...

La créature imaculée aux oreilles de velours se reveilla lentement, se tirant avec bien du mal des brumes de l'inconsience... Le temps de respirer l'odeur de pin, de cligner deux fois des yeux, et une gueule avide se refermait sur son cou. Le lapin, pris de subresauts de plus en plus violents, se débatit, sans pour autant réussir a se liberer. Sa vision devint trouble, puis s'agrémenta de rouge, puis tout devint noir... Une perle d'argent coula de son oeil qui ne reverrait plus jamais ses petits, et il expira enfin, ses flancs agités d'un dernier spasme douloureux ...

Insensible a ce massacre qu'elle perpetuait autant qu'elle le pouvait, la louve déchira le flanc duveteux de la petite créature, et du museau, fouilla dans les entrailles de la bete. Elle y découvrit rapidement le coeur, encore rouge et battant tres faiblement. Elle l'atrappa délicatement entre ses crocs, puis tira d'un coup sec, arrachant tout le réseau sanguin du malhereux polaire. Une centaine de ' fils ' veineux entre les dents, la louve referma ses machoires d'acier, ecrasant le coeur qui livera sa seve divine. Déglutissant avec délices, la louve aspira autant de sang qu'elle le pouvait, puis délaissa le petit cadavre, a peine entamé, mais completement désséché, vidé de son sang. Sans un regard, l'horrible bete s'éloigna. Elle n'avait pas fait ca pour la faim non... Simplement pour le plaisir ... Un plaisir sadique... Un plaisir de démon ...

La majestueuse silouette se déplaca dans la glace, la tete basse, laissant filer son nez dans la neige, le débarrassant du sang et des poils qui le recouvraient, laissant sur son passage une trace sanglante, sonnant comme un terrible avertissement.... Le regard vif de la bete sautait d'une butte a une autre, en quete d'une vie a suprimer, d'un rongeur a expirer, d'un loup a torturer... Pourtant rien. Toutes les créatures s'enfuyaient sur son passage, c'était lassant... Mais si... Plaisant Quelques flocons sur sa tete la tirerent de ses pensés morbides, et elle se redressa, telle une lionne en perpetuelle quete de gibier... Elle parcourut rapidement la foret avoisinante, mais n'y trouva rien que des traces, des odeurs ou des poils... Elle eut enfin de la chance et sauta sur un cobeau. Cette fois elle proceda differament. Elle arracha des ailes de l'oiseau, qu'elle croqua en deux coups de dents, lui décolla les pattes et lui creva les yeux. Ensuite elle s'eloingna, hautaine, le laissant a la merci de n'importe qui, n'importe quoi. Un vrai monstre...

Et ce monstre avait un nom... C'était Rapier, la cruelle...

Un frisson agita inévitablement son corps inanimé lorsque le vent s’engouffra sans retenu sous l’épais pelage tricolore, rencontrant la peau sensible de l’animal allonger. Ce dernier, la tête haute, les oreilles allongées sur la nuque, les yeux à demi fermés, n’eut aucun mouvement face à cette réaction de son corps face à l’air froid. Il n’en éprouva pas moins une infime frustration, car tout frémissement, aussi minime soit-il, reste une marque de faiblesse face au froid. Hors, la faiblesse, sous toutes ses formes, n’avait pas sa place en ce monde cruel, où les éléments se déchaînaient contre chacun, où il faut être fort pour survivre.
Le vent se remis à souffler de plus belle, emportant au loin la vapeur blanchâtre qui s’échappait de la gueule du loup à chacune de ses respirations, soulevant par grande quantité la neige poudreuse du sol instable. Alors qu’une incertaine odeur de sang atteignait le museau du Mortal, ce dernier jugea s’être assez, même trop reposer. Il n’avait pris qu’un court dix minutes de pause, mais il ne pouvait se permettre plus, il ne voulait se permettre plus. Alors, le grand loup se leva, et étira distraitement ses pattes élancées. L’odeur, de plus en plus forte, avait finit par attirer son attention, et c’est donc avec une certaine assurance que Blade pris lentement la direction que lui indiquait son odorat. Ses pattes s’enfonçaient légèrement dans la neige à chaque pas, et sa queue balayait innocemment le sol. Le noir de son dos partiellement recouvert par la poudreuse blanche, le loup tricolore continuait sa progression au pas. Il ne tarda pas à découvrir le petit corps abandonner dans le froid. Éventrer, le lièvre reposait sur le flanc. Son corps était étrangement positionné, comme une feuille morte qu’on aurait laisser au soleil. Blade en comprit le pourquoi en approchant son museau du corps froid. Il n’avait plus de sang. Plus une seule goûte. La découverte du cadavre aurait pu lui offrir un repas sans qu’il ait à chasser, mais le fait qu’il soit vidé de son sang le rendait tout à fait inintéressant. Le loup tricolore fit donc demi-tour et, sans plus se soucier ni du lièvre mort, ni de son meurtrier, le Mortal repris son chemin. Désintéresser, il s’était défait de l’idée de retrouver le tueur. À quoi bon, insociable comme il était, si il le ou la découvrait, il reviendrait aussitôt sur ses pas, alors…
Ce fut donc par pur hasard que le loup tomba sur Rapier. Juste à temps, d’ailleurs, pour assister à la scène macabre de la louve face à un corbeau. Blade observa l’inconnue crever les yeux à sa victime sans réaction. Des horreurs, il en avait vus des tas, et il pouvait supporter beaucoup de choses. Le sang ne le dégoûtait pas, les hurlements de douleur non plus. Il pouvait parfaitement supporter l’ambiance d’un combat, où il serait participant ou spectateur. Alors cette simple mise à mort, cruelle certes, mais pas tout à fait affreuse, ne risquait pas de le traumatiser. Il dut pourtant s’avouer être surpris lorsque la louve délaissa sa proie agonisante pour commencer à s’éloigner. Elle n’avait donc fait ça que pour le plaisir?
Les yeux gris du Mortal restèrent un instant fixés sur l’imposante silhouette. Contrairement à lui, la louve était plutôt courte sur patte, ce qui aurait pu lui donner un air légèrement pataude si elle n’avait pas posséder cette musculature gracieuse, qui taillait son corps bicolore à merveille. À son simple physique, on devinait une très grande force, mais une force brute, dépourvue de toute agilité. Le mâle, lui, abordait un corps, bien musclé aussi, mais cette impression de puissance à l’état brute restait absent. On devinait par contre une grande agilité. En bref, les deux inconnus semblaient différents en tout point. Physiquement, en tout cas. Sa courte inspection terminée, Blade, cligna lourdement des paupières et détourna la tête, soudain désintéresser. Le tricolore s’ébroua, chassant la neige de son pelage, et se remis au pas, passant sans s’en soucie aux côtés du corbeau, à présent mort. Il lança un bref coup d’œil à la louve, pour s’assurer qu’elle ne s’apprêtait pas à lui bondir dessus. Car, si Rapier ne lui faisait pas peur, il ne doutait pas qu’un combat contre elle serait éprouvant et, contrairement à la meurtrière, il ne se plaisait pas à faire couleur le sang à longueur de journée. Il préférait de loin rester seul. D’ailleurs, si les deux loups pouvaient se séparer assez rapidement, il n’en serait pas frustrer. Au contraire, se retrouver seul à nouveau lui semblait une très douce possibilité, surtout que la meurtrière se trouvait être une louve. Non qu’il soit sexiste, mais le temps l’avait habituer aux groupies disjonctées, qui lui couraient après à longueur de journée. Et, franchement, il n’avait pas envi de se retrouver avec une louve comme Rapier bavant devant lui. Mais, pour une raison qui lui échappait, il était persuadé que ce ne serait pas le cas. Il n’allait pas s’en plaindre, disons.